L’acheteur ne peut pas modifier son projet de construction sans l’accord du vendeur

Une promesse synallagmatique de vente est signée sous la condition suspensive d’obtention d’un permis de construire concernant un programme de 1100 m² de surface de plancher minimum, à déposer dans un délai de 12 mois, un prix minimum étant fixé mais variant à la hausse en fonction du nombre de m² supplémentaires accordés. L’acheteur ne dépose pas de demande de permis de construire (compte tenu de la forte probabilité d’un recours des riverains), mais une déclaration préalable pour la réalisation d’un lotissement de 4 logements de standing. Après mise en demeure infructueuse de justifier du dépôt de la demande de permis de construire dans le délai convenu, le vendeur notifie à l’acheteur la caducité de la promesse de vente et demande le paiement de la clause pénale. L’acheteur assigne le vendeur en perfection de la vente et exécution forcée. La cour d’appel juge que la promesse de vente est caduque et le condamne au paiement de la clause pénale au motif qu’il a empêché la réalisation de la condition suspensive, faute d’avoir déposé la demande de permis de construire dans les conditions prévues. L’acheteur forme un pourvoi en faisant valoir qu’il avait renoncé à cette condition, que le vendeur ne peut pas se prévaloir d’une condition qui n’est pas stipulée dans son intérêt et que la clause pénale ne sanctionne que la partie qui fait obstacle à la réitération de l’acte.

La Cour de cassation rejette le pourvoi. Elle retient que le vendeur est fondé à invoquer la caducité de la promesse de vente au motif que l’acheteur ne justifie pas avoir déposé la demande de permis de construire dans le délai prévu et que le vendeur n’avait pas accepté la modification du projet de construction de l’acheteur. Elle rappelle qu’une clause pénale sanctionne un manquement contractuel. Le vendeur n’a pas fait obstruction de manière abusive à la vente, il s’est seulement prévalu du non-respect par l’acheteur de ses propres obligations.

À noter : L’acheteur, qui conditionne la réitération de la vente à l’obtention d’un permis de construire, doit déposer une demande dans le respect des termes de la promesse de vente. Dans l’arrêt commenté, l’acheteur reproche à la cour d’appel de ne pas avoir recherché si le délai de dépôt de la demande de permis de construire n’avait pas été stipulé dans son intérêt exclusif pour le cas où il voudrait se prévaloir de la condition. La Cour de cassation n’a pas retenu cet argument et confirme que le vendeur était fondé à invoquer la caducité de la promesse de vente, en particulier du fait de l’impossibilité de déterminer le prix de vente à l’expiration du délai contractuel. Le litige est jugé en vertu des dispositions applicables avant la réforme du droit des contrats mais on peut penser que la solution est transposable car l’acheteur est fautif s’il empêche l’accomplissement de la condition suspensive, même stipulée dans son intérêt exclusif (C. civ. art. 1304-3).

En pratique, l’acheteur, qui modifie son projet de construction objet d’une condition suspensive, a tout intérêt à solliciter la régularisation d’un avenant à la promesse de vente afin obtenir l’accord du vendeur pour modifier en conséquence les modalités de la condition suspensive, afin de pouvoir se prévaloir de ce nouvel accord mais également de ne pas manquer aux accords initiaux.

Pauline PERPOIL

Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Vente immobilières 30702 et 30708 


Cass. 3e civ. 1-4-2021 n° 20-14.194 F-D

Source : https://www.efl.fr/actualites/immobilier/vente-immobiliere/details.html?ref=fcc7bae8e-289a-4961-a814-73f4d16f83f1