L’emprunteur inscrit au RCS après la formation du contrat de prêt n’est pas forcément un consommateur

Une banque consent en 2007 un prêt immobilier à un couple en vue de financer l’acquisition d’un appartement en l’état futur d’achèvement. Le remboursement du prêt ayant cessé en 2009, la banque prononce la déchéance du terme et assigne les emprunteurs en paiement du prêt.

Ces derniers saisissent la justice. Ils soutiennent notamment qu’ils n’ont pas bénéficié du délai de réflexion de 10 jours entre la réception de l’offre de prêt et son acceptation (C. consom. art. L 312-10 ancien, désormais art. L 313-34). La banque conteste : les dispositions légales protégeant les emprunteurs non-professionnels (C. consom. art. L 312-1 s. anciens, désormais art. L 313-1 s.) ne sont pas applicables, le mari étant enregistré au registre du commerce et des sociétés (RCS) en qualité de loueur en meublé professionnel.

La cour d’appel ne l’entend pas ainsi. Les dispositions du Code de la consommation s’appliquent, l’immatriculation au RCS (le 15 novembre 2007) étant postérieure à l’acceptation de l’offre de prêt (le 6 avril 2007). La méconnaissance du délai de 10 jours est sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels.

L’arrêt est cassé. Après avoir rappelé que les personnes physiques ou morales qui empruntent à l’effet de financer une activité professionnelle sont expressément exclues du champ d’application du dispositif protecteur (C. consom. art. L 312-3, 2° ancien, désormais art. L 313-2, 2°), la Haute Juridiction juge que les motifs de la cour d’appel sont « insuffisants à caractériser que les emprunteurs avaient agi à des fins étrangères à une activité professionnelle, fût-elle accessoire ».

À noter : La Cour de cassation a déjà considéré que le crédit accordé à un emprunteur inscrit au RCS en qualité de loueur en meublé professionnel pour acquérir divers lots de copropriété en vue de les louer « était destiné à financer une activité professionnelle, fût-elle accessoire » (Cass. 1e civ. 25-1-2017 n° 16-10.105 F-PB : BRDA 6/17 inf. 18).

Pour la Haute Juridiction, la date de l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés importe peu. Le simple fait pour l’emprunteur de s’être inscrit au RCS plusieurs mois après la conclusion du contrat de prêt ne signifie pas forcément qu’il est un consommateur défini par le Code de la consommation « comme toute personne physique qui agit à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole » (C. consom. art. liminaire). La Cour de cassation invite les juges du fond à compléter leurs investigations en vérifiant, par exemple, si d’autres crédits ont été accordés pour financer des opérations similaires (Cass. 1e civ. 6-12-2017 n° 16-10.341 F-D : RJDA 4/18 n° 369). Dans la présente affaire, le caractère professionnel de l’activité des emprunteurs ne faisait pas de doute, la banque rapportant que les emprunteurs avaient souscrit 15 prêts auprès de plusieurs établissements de crédit pour un montant total de 3 752 032 € en vue d’acquérir plusieurs bien immobiliers destinés à être exploités sous le statut de loueur en meublé professionnel.

Olivier DESUMEUR 

Pour en savoir plus sur cette question, voir Mémento Vente immobilière n° 42010

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Cass. 1e civ. 21-10-2020 n° 19-13.359 F-D

Source : https://www.efl.fr/actualites/immobilier/details.html?ref=f6b1cbd35-03d2-4e6d-a3d0-4a9e5cb8250d