PLFSS 2021 : de nouveaux amendements adoptés par les sénateurs en première lecture

Nous exposons ci-après les principales modifications apportées au projet de loi par les sénateurs par rapport au texte d’origine présenté en Conseil des ministres et au texte adopté par les députés (voir La Quotidienne du 9-11-2020). Ne sont présentés ici que les amendements significatifs adoptés à l’initiative du Gouvernement ou avec son avis favorable.

Par ailleurs, certains articles ont d’ores et déjà été votés conformes. Il en est ainsi notamment :

– de la mesure proscrivant toute baisse du plafond annuel de la sécurité sociale d’une année sur l’autre (art 12) ;

– du dispositif spécifique d’exonération dans le secteur vitivinicole (art. 13 bis) ;

– des mesures concernant les loueurs de meublé de courte durée (art. 14) ;

– de la dématérialisation des formalités auprès du Guso (art. 15 quinquies) ;

– des dispositions en faveur des non-salariés agricoles (suppression du délai de carence en temps partiel thérapeutique, art. 34 bis ; bénéfice des IJ maladie ordinaires à certaines conditions, art. 34 ter ; agrément des agents des CGSS, art. 15 ter) ;

– de l’allongement du congé de paternité et d’accueil de l’enfant, du congé d’adoption, du congé de reclassement et de mobilité (art. 35).

Notons que la CMP a échoué le 17 novembre sur ce projet, qui doit donc revenir en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale le 24 novembre et au Sénat le 26 novembre. La lecture définitive doit intervenir le 30 novembre. Nous ferons un commentaire détaillé de la loi définitivement adoptée dans le FRS 24/20 du 11 décembre (numéro spécial PLFSS).

Paie

Le dispositif d’exonération et d’aide au paiement des cotisations sociales patronales serait aménagé

Lors de la discussion du PLFSS 2021 à l’Assemblée nationale, un nouvel article 6 ter a été introduit, à l’initiative du Gouvernement, pour prévoir un dispositif d’exonération de cotisations patronales pour les entreprises les plus affectées par la deuxième vague de l’épidémie de Covid-19.

Pour mémoire, les entreprises éligibles bénéficieraient d’une exonération totale des cotisations et contributions sociales patronales, à l’exception des cotisations dues au titre des régimes de retraite complémentaire obligatoire. Cette exonération serait appliquée sur les cotisations et contributions restant dues après application, le cas échéant, de tous les autres dispositifs d’exonération ou de réduction de cotisations sociales.

Le Sénat a adopté sur proposition du Gouvernement un amendement réécrivant une bonne partie de l’article 6 ter afin d’assouplir et de clarifier le champ des employeurs éligibles, ainsi que la période d’exonération, pour tenir compte de la mise en place successive du couvre-feu puis d’un deuxième confinement.

Le champ des employeurs éligibles serait clarifié         

Des assouplissements pour les employeurs de moins de 250 salariés

Sans changement demeureraient éligibles les employeurs de moins de 250 salariés qui exercent leur activité principale :

– dans les secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, de l’évènementiel et du transport aérien. Signalons que ce dernier secteur ne figurait pas dans la liste votée par les députés, mais qu’il ne faisait guère de doute qu’il s’agissait d’un oubli qui serait réparé au cours des débats parlementaires ;

 – dans des secteurs d’activité dont l’activité dépend de celle des secteurs mentionnés ci-dessus.

A noter : Le PLFSS 2021 maintiendrait ainsi la distinction entre les secteurs S1 et S1 bis adoptée lors des premières mesures prévues par la troisième loi de finances rectificative du 30 juillet 2020 pour soutenir les entreprises face à la première vague de Covid-19.

La liste des secteurs concernés figure en annexe du décret 2020-371 du 30 mars 2020 modifié relatif au fonds de solidarité. Relevons que la liste de ces secteurs a été très récemment élargie par un décret 2020-1328 du 2 novembre 2020. Par effet domino, cette extension est applicable à l’exonération Covid-1 et le sera, selon toute probabilité, à cette nouvelle exonération Covid-2.

Pour pouvoir prétendre à l’exonération, les employeurs de ces secteurs devraient subir les conséquences économiques et financières de la propagation de l’épidémie de Covid-19.

Seraient précisément visés les employeurs :
– ayant fait l’objet de mesures d’interdiction d’accueil du public, à l’exception des activités de livraison, de retrait de commande ou de vente à emporter, prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire ;
– ou qui ont constaté au titre du mois suivant celui au titre duquel l’exonération est applicable une baisse de chiffre d’affaires d’au moins 50 % par rapport à la même période de l’année précédente. Aucune condition liée à une interdiction d’accueil du public ne serait posée dans ce cas. Un décret devrait prévoir, notamment pour les activités présentant une forte saisonnalité, les modalités d’appréciation de la baisse de chiffre d’affaires.

A noter : La condition de baisse d’activité de 50 % serait généralisée à toutes les entreprises de moins de 250 salariés. La première mouture du texte, adoptée à l’Assemblée nationale, distinguait les secteurs prioritaires et les secteurs en dépendant et exigeait pour les seconds une baisse de chiffre d’affaires d’au moins 80 %.

Certains employeurs de moins de 50 salariés deviendraient éligibles

Serait également éligible une nouvelle catégorie d’employeurs : ceux dont l’effectif est inférieur à 50 salariés et qui rempliraient les conditions cumulatives suivantes :

– exercer leur activité principale dans d’autres secteurs que ceux mentionnés ci-dessus ; 
– avoir fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public affectant de manière prépondérante la poursuite de leur activité, à l’exception des activités de livraison, de retrait de commande ou de vente à emporter.

A noter : Comme pour l’exonération Covid-1 qui visait les TPE de moins de 10 salariés, le nouveau dispositif concernerait les petites entreprises, cette fois de moins de 50 salariés. Selon les explications du Gouvernement, il s’agit de couvrir les commerces qualifiés de « non essentiels » fermés à partir de novembre 2020 sur l’ensemble du territoire.

La période d’exonération serait adaptée

Au moment du vote du projet en première lecture à l’Assemblée nationale, le 27 octobre 2020, la décision d’un deuxième confinement, acté par le Gouvernement le 29 octobre 2020, n’était pas encore prise. Seuls étaient en vigueur des couvre-feux dans plusieurs départements et régions de France.

Pour tenir compte de cette nouvelle situation, la période d’application de l’exonération serait adaptée en distinguant deux situations.

Pour les entreprises concernées par le couvre-feu

L’exonération serait d’abord applicable, au titre des périodes d’emploi courant à compter du 1er septembre 2020, aux cotisations et contributions dues par les employeurs de moins de 250 salariés visés par le dispositif, à condition, pour ceux exerçant dans les secteurs prioritaires, qu’ils exercent leur activité dans un lieu ayant fait l’objet d’interdiction d’accueil du public (en dehors des activités de livraison, retrait de commande ou vente à emporter) prise dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire avant le 30 octobre 2020.

Seraient donc visés les employeurs des zones où ont été instaurés des couvre-feux avant le 30 octobre (par exemple, dès le 17 octobre pour l’Île-de-France et 8 grandes agglomérations).

Pour les entreprises impactées par le deuxième confinement

L’exonération Covid-2 serait, en revanche, applicable aux cotisations et contributions dues au titre des périodes d’emploi courant à compter du 1er octobre 2020 :

– pour les employeurs exerçant dans un lieu concerné par les mesures de réglementation ou d’interdiction de la circulation des personnes ou d’accueil du public prises à compter du 30 octobre 2020 ;

– pour ceux établis dans les départements d’outre-mer où ces mesures ne sont pas applicables.

Une durée maximale d’exonération de 3 mois

Cette exonération serait applicable pour une période maximale de 3 mois et au plus tard pour les périodes d’emploi courant jusqu’au 30 novembre 2020.

A noter : L’exonération porterait donc sur les cotisations entrant dans son champ, dues au titre des périodes d’emploi de septembre, octobre et novembre 2020, au maximum.

Par ailleurs, la condition de baisse d’activité exigée de certains employeurs étant appréciée le mois suivant celui au titre duquel l’exonération serait applicable, elle serait donc appréciée d’octobre à décembre.

Une même période d’emploi ne pourrait ouvrir droit à deux aides au paiement

S’agissant de l’aide au paiement des cotisations, il serait précisé que les rémunérations des périodes d’emploi ouvrant droit à l’aide instituée par la troisième loi de finances rectificative pour 2020 ne pourraient pas bénéficier de celle instituée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 (projet art. 6 ter). Ainsi, les employeurs encore éligibles à la première aide (comme les discothèques par exemple) ne pourraient pas cumuler les deux aides sur une même période.

Les mandataires sociaux assimilés à des salariés bénéficieraient d’une réduction de cotisations

Les dirigeants et mandataires sociaux assimilés à des salariés à l’égard de la sécurité sociale (tels que les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL) bénéficieraient d’une réduction des cotisations et contributions dues au titre de l’année 2020 ou de l’année 2021 (projet art. 6 ter). Cette aide, dont le montant et les modalités d’imputation seraient fixés par décret, serait réservée aux mandataires sociaux dont l’entreprise répond aux conditions d’effectif, d’activité principale, de lieu d’exercice de l’activité et de fermeture ou de baisse de chiffre d’affaires exigées pour bénéficier de l’exonération à laquelle ouvrent droit les salariés.

A noter : Serait donc institué un dispositif d’aide semblable à celui mis en place par la circulaire 2020-160 du 22 septembre 2020 pour la première vague de Covid.

L’exonération des avantages pour favoriser le sport en entreprise serait adaptée

Les sénateurs ont adopté un amendement, avec l’avis favorable du Gouvernement, afin de rétablir dans le projet de loi l’exemption de l’assiette de cotisations sociales portant sur les avantages que représentent pour ses salariés la mise à disposition par l’employeur d’équipements sportifs à usage collectif et le financement de prestations sportives, afin de favoriser le développement du sport en entreprise (projet art. 13 ter). L’exemption concernerait les cotisations et les contributions sociales (y compris la CSG et la CRDS). Des conditions et des limites seraient définies par décret. L’article L 136-1-1 du CSS serait en conséquence modifié.

Actuellement, cette exemption, issue de l’article 102 de la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (non promulguée) et qui figure à l’article L 242-1, II-8° du CSS, porte sur les cotisations de sécurité sociale.  Les avantages restent donc assujettis à la CSG et à la CRDS.

En première lecture, les députés ont souhaité supprimer cette disposition. Pour eux, n’étant ni limitée dans sa portée ni soumise à des conditions particulières, elle était en effet source de difficultés. Par ailleurs, le Gouvernement ayant publié une lettre ministérielle en décembre 2019 précisant les conditions d’exonération de l’avantage constitué par l’accès des salariés à un équipement sportif en entreprise, les députés considéraient que l’ajout d’une disposition législative n’aurait pas eu pour effet d’encourager davantage les activités sportives.

En cas de paiement partiel des cotisations, celui-ci serait d’abord imputé sur la dette principale

Le CSS fixerait expressément les règles d’imputation des paiements partiels de cotisations.

Un principe serait énoncé selon lequel le paiement est prioritairement imputé sur la créance due au principal, puis, le cas échéant, sur les majorations de retard et pénalités restant dues et sur les frais de justice.

Pour l’affectation du paiement partiel aux sommes dues à titre principal, le CSS indiquerait que la CSG et la CRDS sont prélevées par priorité et dans des proportions identiques sur les sommes recouvrées.

Pour le solde éventuel, ce Code préciserait qu’il est affecté au prorata du montant de chaque créance aux cotisations salariales, puis patronales et enfin aux contributions patronales. Toutefois, pour ces dernières, l’imputation serait prioritairement effectuée sur les dettes les plus anciennes.

Insérée à l’article L 133-4-11 du CSS, soit dans la partie de ce Code commune aux différents régimes de base de sécurité sociale, cette précision concernerait aussi bien les cotisations dues par les employeurs que les cotisations personnelles des travailleurs non salariés.

A noter : Adopté avec l’avis favorable du Gouvernement, l’article 15 sexies viendrait contrecarrer la jurisprudence de la Cour de cassation priorisant les frais de justice en cas de paiement partiel des cotisations et contributions sociales.

On notera également que l’article L 133-4-11 du CSS, tel que modifié par l’article 15 sexies du projet de loi, comporte, à ce stade, des incohérences rédactionnelles qui seront probablement rectifiées lors de la deuxième lecture du texte par l’Assemblée nationale (notamment, pour ce qui concerne la CSG, un renvoi à l’article L 136-3 du CSS qui aurait dû, nous semble-t-il, être remplacé par un renvoi à l’article L 136-1 du même Code).

Travail dissimulé 

L’article L 133-4-2 du CSS prévoit une suppression des mesures de réductions ou d’exonération de cotisations en cas de constatation d’infractions de travail dissimulé, de marchandage, de prêt illicite de main-d’œuvre ou d’emploi d’étrangers non autorisés à travailler.

Cette annulation peut toutefois être partielle, notamment lorsque la dissimulation d’activité ou de salariés représente une proportion limitée de l’activité ou des salariés régulièrement déclarés, sauf dans deux cas : si elle concerne des mineurs ou des personnes vulnérables.

Les sénateurs ont adopté, sur avis favorable du Gouvernement, un amendement visant à interdire également la modulation de la sanction lorsque les faits de travail dissimulé sont commis en bande organisée.

Cet amendement prévoit par ailleurs de modifier les modalités d’appréciation du caractère limité de la dissimulation. Alors que, actuellement, en application de l’article R 133-8 du CSS, la dissimulation est considérée comme limitée si les sommes assujetties à la suite du constat d’une des infractions précitées n’excèdent pas 10 % des rémunérations déclarées au titre de la période d’emploi faisant l’objet du redressement pour les employeurs de moins de 20 salariés et 5 % pour les autres, elle serait appréciée au regard de la seule activité. Ainsi, le plafond de l’activité dissimulée permettant la modulation serait le même, quel que soit le nombre de salariés concernés.

Travailleurs indépendants

L’article 6 ter, III, adopté par l’Assemblée nationale en première lecture sur proposition du Gouvernement, prévoit une réduction exceptionnelle de cotisations de sécurité sociale pour les travailleurs indépendants et les non-salariés agricoles affectés par la seconde vague de Covid-19 sous réserve de certaines conditions.

Le Sénat a adopté un amendement présenté par le Gouvernement, afin d’inclure dans le champ d’application de cette réduction, initialement limité aux cotisations dues au titre de l’année 2021, celles dues au titre de l’année 2020.

En outre, les conditions que devraient remplir les intéressés pour bénéficier de cette réduction ont également été modifiées. Ces conditions sont, en effet, celles posées pour l’exonération de cotisations patronales Covid-19 par l’article 6 ter, I qui ont fait l’objet des modifications exposées ci-dessus.

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Source : https://www.efl.fr/actualites/social/emploi-chomage/details.html?ref=fd490e937-8bfe-46ea-b510-6a9a969ce3be